Hypnose médicale, séduisante…

par | J,Fév 2023 | Non classé | 0 commentaires

Une opération pratiquée sous hypnose entraîne moins d’effets secondaires et moins de prises d’antalgiques pour le patient.
AMÉLIE-BENOIST/BSIP

L’hypnose médicale permet de soulager des patients au bloc opératoire, atténue les douleurs chroniques ou les troubles neurologiques. Les études commencent à apporter les preuves de son efficacité.

Lors de certaines opérations cérébrales, les patients doivent rester éveillés afin d’aider le chirurgien à naviguer dans leur cerveau sans léser de zones critiques (langage, mouvement). C’est là que le docteur Catherine Bernard, anesthésiste au service de neurochirurgie du CHU du Kremlin-Bicêtre (Valde-Marne), intervient. Elle accompagne les patients par « hypno-sédation », technique combinant hypnose et sédation.

La méthode vise à modifier les perceptions du patient, guidé par l’hypnothérapeute. « Au préalable, nous construisons avec le patient un scénario, une évasion mentale, explique Catherine Bernard. Puis le jour de l’intervention, je guide la personne dans ce voyage intérieur pour qu’elle ait une perception réduite de l’environnement, de l’anxiété et de la douleur. » L’hypnose ne dure pas toute l’opération. « Lorsque le chirurgien a besoin de la coopération du patient, je fais revenir ce dernier “ici et maintenant” pour répondre aux tests. Puis, je le fais “repartir”, ce qui permettrait un meilleur vécu de l’intervention, moins d’antalgiques et moins d’effets secondaires », détaille l’anesthésiste.

À ce jour, plus de 1200 études ont été menées sur l’hypno-sédation à travers le monde (et plus de 14.000 sur l’hypnose en général). Pourtant, la méthode demeure non reconnue par l’ordre des médecins et n’est pas remboursée par la Sécurité sociale en France. À la demande de la Direction générale de la santé (DGS), le professeur Bruno Falissard, Juliette Gueguen et Caroline Barry, de l’Inserm, ont réalisé un premier rapport d’expertise sur cette pratique. « En ce qui concerne la sécurité de l’hypnose, les études sont rassurantes, assure le rapport publié en 2015. Il faut toutefois être vigilant sur les dérives éthiques que les techniques de suggestions peuvent entraîner. » Côté efficacité, l’équipe a passé au crible les essais cliniques sur l’hypno-sédation lors de biopsies mammaires, d’extractions dentaires, ou encore au cours d’interruptions médicales de grossesse. Le bilan est positif : « Il existe suffisamment d’éléments pour pouvoir affirmer que l’hypnose a un intérêt thérapeutique potentiel », conclut l’expertise.

Plus efficace sur les pathologies chroniques

Hors de l’hôpital, les recours à l’hypnose se multiplient pour des pathologies parfois inattendues. Constance Flamand-Roze, hypnopraticienne à l’Institut français des pratiques psycho-corporelles (IFPPC), aide les patients atteints de la maladie de Parkinson à contrôler leurs tremblements. « Je leur propose d’imager leurs symptômes. Comment imaginent-ils leurs tremblements ? Cela peut être par exemple des fourmis sur la peau « , explique-t-elle. Puis ils apprennent à reprendre le contrôle « en chassant les insectes ». La technique s’adapte aussi à la migraine: « on imagine desserrer un étau autour de la tête » ; à l’aphasie : « on se promène dans un jardin de mots que l’on cueille » ; ou encore aux tics de l’enfant « qui doit trouver une formule magique pour les éliminer ».

Isabelle Célestin-Lhopiteau, directrice de l’IFPCC (lire p. 27), l’assure : « C’est sur les pathologies chroniques, notamment les douleurs, que les pratiques esprit-corps comme l’hypnose interviennent le mieux. » « Le nombre d’études, leur qualité méthodologique et la concordance des résultats sont tels que l’on peut être assez serein pour dire que l’hypno-analgésie est efficace… », affirme Bruno Falissard. En particulier – selon le rapport de l’Inserm – pour le syndrome du côlon irritable.

En revanche, les preuves seraient insuffisantes pour les douleurs de l’accouchement. Pourtant, parfois, médecins et patientes semblent dire le contraire. « Le vécu émotionnel des patients n’est pas traduit en données numériques à l’aide des instruments cliniques habituellement utilisés dans les études », explique Bruno Falissard. « Dans le traitement de la douleur, c’est autant sur les aspects émotionnels de celle-ci que sur l’intensité elle-même que l’hypnose agit », ajoute Isabelle Célestin-Lhopiteau. Tous deux appellent donc à créer d’urgence de nouveaux critères d’évaluation de l’hypnose et des autres pratiques psycho-corporelles, non conventionnelles.

Les effets positifs de l’hypnose dans le temps

Si vous souhaitez en savoir plus sur les effets que le cerveau peut avoir sur le corps, Sciences et Avenir est partenaire d’un colloque intitulé « Science et pratiques corps-esprit« , qui réunit du 13 au 15 décembre 2018 à la Sorbonne des chercheurs et praticiens.

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